N° 27602507

Impact des réglages du ventilateur artificiel sur la commande et l'effort respiratoires lors de la transition de la ventilation contrôlée à la ventilation assistée

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Objectif(s) de la recherche et intérêt pour la santé publique

Finalité de l'étude

Recherche, étude, évaluation

Objectifs poursuivis

Prise en charge des patients

Domaines médicaux investigués

Anesthésiologie-Réanimation
Cancérologie

Bénéfices attendus

JUSTIFICATION SCIENTIFIQUE
La ventilation à la phase aiguë du syndrome de détresse respiratoire aigu (SDRA) est largement étudiée et fait l’objet de recommandations actualisées (Grasselli et al., 2023; Papazian et al., 2019; Qadir et al., 2024). Le sevrage ventilatoire fait également l’objet de nombreuses études avec des recommandations des sociétés savantes (Boles et al., 2007; Burns et al., 2021; Pham et al., 2023; Roberts et al., 2024). En revanche, la période située entre la phase aiguë et le sevrage, appelée phase de transition, est peu décrite et nécessite des explorations complémentaires. Cette phase de transition comporte pourtant des étapes-clés dans la ventilation du patient, en particulier la reprise de la ventilation spontanée et le passage en ventilation assistée. D’un côté, retarder la transition vers la ventilation assistée, et donc in fine le sevrage, risque de prolonger la durée de ventilation mécanique et donc d’exposer le patient aux complications qui y sont associées (Boles et al., 2007; Burns et al., 2021). De l’autre, la reprise d’une ventilation spontanée sur des poumons lésés peut exposer le patient au risque de lésions pulmonaire auto-infligées (P-SILI) (Brochard et al., 2017; Carteaux et al., 2021). Dans des cohortes observationnelles, l’échec de transition de la ventilation contrôlée vers la ventilation assistée est fréquent (de 32 à 57% des patients) et associé à un moins bon pronostic avec une mortalité plus élevée et une durée de ventilation prolongée (Esnault et al., 2020; Haudebourg et al., 2025; Pérez et al., 2023; Polo Friz et al., 2024). En effet, un drive respiratoire élevé lors de cette transition entrainant des efforts inspiratoires excessifs peut générer du P-SILI via différents mécanismes (Brochard et al., 2017; Carteaux et al., 2021) : (i) une pression transpulmonaire élevée générant des grands volumes courants responsables de surdistension, (ii) une distribution hétérogène des variations négatives de pression pleurale responsable de phénomème de pendelluft (Yoshida et al., 2013), (iii) une augmentation du retour veineux systémique et de la pression transmurale vasculaire aggravant l’œdème pulmonaire. A l’extrême inverse, des efforts inspiratoires insuffisants pendant cette phase de transition peuvent participer à l’aggravation d’une dysfonction diaphragmatique, potentiellement préjudiciable pour le sevrage (Battaglini and Rocco, 2024; Bertoni et al., 2020; Goligher et al., 2019; Jung et al., 2016).
La ventilation spontanée avec aide inspiratoire (VSAI) est le mode de ventilation assistée le plus largement utilisé en France et dans le monde (Esteban et al., 2013, 2008). Chez les patients à risque de SDRA, maintenir un petit volume courant (entre 6 et 8 mL/kg de poids prédit par la taille (PPT)) est la pierre angulaire de la ventilation protectrice (Acute Respiratory Distress Syndrome Network et al., 2000; Grasselli et al., 2023; Papazian et al., 2019; Qadir et al., 2024). En VSAI, la pression transpulmonaire, et donc la génération du volume courant, dépend à la fois du niveau d’aide inspiratoire réglé et de l’effort inspiratoire du patient. Le volume courant peut-être difficile à contrôler car selon le niveau d’assistance, le patient va modifier son effort en réponse à une augmentation ou une diminution du niveau d’aide inspiratoire (Docci et al., 2023, 2024). Maintenir un effort respiratoire dans des niveaux acceptables (pression musculaire (Pmus) entre 5 et 10 cmH2O, produit pression-temps œsophagien (PTPes) entre 50 et 150 cmH2O.s.min-1 (Mauri et al., 2016; Goligher et al., 2020)), permettrait également de limiter les lésions pulmonaires (P-SILI) et diaphragmatiques causées par la sur- ou la sous-assistance. Dans les cohortes s’étant intéressées à la transition, un drive respiratoire excessif (Esnault et al., 2020; Le Marec et al., 2024) et un volume courant élevé (Haudebourg et al., 2025) étaient associés à l’échec de la ventilation assistée et à un moins bon pronostic.
Mesurer précisément l’effort respiratoire nécessite la mise en place d’une sonde œsophagienne (Mauri et al., 2016), ce qui n’est pas réalisé dans tous les centres et chez tous les patients. La pression occlusive à 0.1 seconde (P0.1) est la pression négative générée dans les voies aériennes lors d’une micro-occlusion de 100 ms (non ressentie par le patient) au début de l’inspiration. Elle reflète l’intensité de la commande respiratoire et est généralement corrélée au niveau d’effort inspiratoire (Whitelaw et al., 1975; Alberti et al., 1995). Il s’agit d’une mesure simple, non-invasive et aujourd’hui disponible et automatisée sur tous les ventilateurs de réanimation. Une P0.1 inférieure à 1 – 1.5 cmH2O permet de détecter un effort insuffisant, et donc une probable sur-assistance, avec une bonne précision (Telias et al., 2020). Une P0.1 supérieure à 3.5 – 4 cmH2O permet de détecter un effort excessif, et donc une probable sous-assistance. Ainsi, afin de maintenir une ventilation protectrice à la fois pour les poumons et pour le diaphragme, les experts recommandent d’adapter l’aide inspiratoire en VSAI pour obtenir une P0.1 entre 1 et 4 cmH2O (Battaglini and Rocco, 2024; Bertoni et al., 2020; Goligher et al., 2020).
Des données prospectives sur l’ajustement de l’aide inspiratoire par les cliniciens et notamment son effet sur le volume courant et sur le drive/effort respiratoire sont nécessaires pour une meilleure compréhension des enjeux de cette phase de transition. Notamment, la faisabilité chez tous les patients d’une stratégie de réglage de l’aide inspiratoire sur un objectif de P0.1 entre 1 et 4 cmH2O n’est pas démontrée à ce jour. En effet, l’aide inspiratoire va permettre de compenser la charge respiratoire mais les causes d’augmentation du drive respiratoire sont multiples (Spinelli et al., 2020) : élévation de la charge respiratoire (élévation des résistances, diminution de la compliance du système respiratoire), altération des échanges gazeux, acidose métabolique, inflammation, anxiété, douleur. L’évaluation de la proportion de patients chez qui l’ajustement de l’aide inspiratoire ne permet pas de contrôler le drive respiratoire et du profil de ces patients est nécessaire à l’établissement de protocoles de recherche futurs sur l’ajustement des réglages du ventilateur lors de la phase de transition.
Nous faisons l’hypothèse que l’ajustement de l’aide inspiratoire en VSAI ne permet pas d’obtenir une P0.1 dite « protectrice » (entre 1 et 4 cmH2O) chez tous les patients, notamment en cas de cause extra-respiratoire d’augmentation du drive respiratoire.

OBJECTIFS DE L’ETUDE ET CRITERES D’EVALUATION
* Objectif principal et critère de jugement principal
L’objectif principal est d’évaluer la proportion de patients chez qui l’ajustement de l’aide inspiratoire ne permet pas d’obtenir une P0.1 entre 1 et 4 cmH2O pour cibler une ventilation protectrice pour les poumons et le diaphragme pendant la phase de transition.

Le critère de jugement principal sera la proportion de patient chez qui l’ajustement de l’aide inspiratoire par le clinicien ne permet pas d’obtenir une P0.1 entre 1 et 4 cmH2O lors de la phase de transition de la ventilation contrôlée à la ventilation assistée.

* Objectifs secondaires et critères de jugement secondaires
Les objectifs secondaires sont les suivants :
- Évaluer les facteurs associés à l’impossibilité d’obtenir une P0.1 entre 1 et 4 cmH2O malgré ajustement du niveau d’aide inspiratoire.
- Évaluer la proportion de patients avec une décorrélation entre le drive et l’effort respiratoire
- Évaluer l’impact de l’impossibilité d’obtention de la P0.1 cible sur l’échec de la transition vers la ventilation assistée (défini par un retour en ventilation contrôlée dans les 48 heures), la durée entre la transition et la première épreuve de ventilation spontanée (EVS) et le devenir des patients.

Les critères d’évaluation secondaires suivants seront évalués et comparés entre les patients avec une P0.1 entre 1 et 4 cmH2O et les patients en dehors de cette cible malgré ajustement de l’aide inspiratoire par le clinicien :
- Caractéristiques démographiques et antécédents médicaux
- Résistances (Rrs) et compliance du système respiratoire (Crs)
- Gaz du sang artériels (si réalisé) du jour de la 1e transition vers la ventilation assistée
- Échelles de douleur et d’anxiété (Behavioral Pain Scale (BPS))
- Doses de sédation, échelle de sédation (Richmond Agitation-Sedation Scale (RASS)) et de delirium (CAM-ICU)
- Pressure muscle index (PMI) (Foti et al., 1997) et pression d’occlusion (Pocc) (Bertoni et al., 2019) (évaluation non invasive de l’effort respiratoire grâce aux courbes du ventilateur réalisée de manière systématique dans les centres experts participants lors d’un premier passage en VSAI)
- Proportion de retour en ventilation contrôlée dans les 48 heures suivant la transition vers la ventilation assistée
- Durée de ventilation mécanique (évaluée par les Ventilator Free Days (VFDs) à J28)
- Durée entre la transition et la première épreuve de ventilation spontanée
- Mortalité en réanimation, à l’hôpital et à J28

METHODE ET POPULATION
* Type d’étude et catégorie de la recherche
Il s’agit d’une étude de cohorte prospective observationnelle multicentrique sur données de santé, n’impliquant pas la personne humaine (hors loi Jardé) et répondant à la méthodologie de référence MR-004.

* Justification de la qualification
Il s’agit d’une réutilisation secondaire à des fins de recherche de données collectées dans le cadre du soin. Aucune donnée supplémentaire ne sera recueillie, aucun acte n’est ajouté par la recherche.

* Sources des données et centres participants
Les données seront issues des dossiers médicaux et des pancartes de surveillance des patients.
Les centres participants sont :
- Service de Médecine Intensive Réanimation, CHU Henri Mondor (AP-HP), Créteil
- Service de Réanimation Polyvalente, Hôpital Saint Joseph Saint Luc, Lyon
- Service de Médecine Intensive Réanimation, CHU de Poitiers, Poitiers
- Service de Médecine Intensive Réanimation, Hôpital de Bicêtre (AP-HP), Le Kremlin-Bicêtre

* Population étudiée
Critères d’inclusion :
- Age > 18 ans
- Ventilation mécanique invasive > 24h
- Au moins un facteur de risque de SDRA (ARDS Definition Task Force et al., 2012; Matthay et al., 2024)
- Première transition vers la VSAI < 24h

Critères de non-inclusion :
- Intubation pour cause neurologique centrale (accident vasculaire cérébral, hémorragie intracrânienne, traumatisme crânien grave)
- Paralysie diaphragmatique connue
- Femme enceinte ou allaitante
- Protection juridique (tutelle, curatelle)
- Prisonnier
- Absence d’affiliation à la sécurité sociale

* Procédure d’arrêt prématuré de collecte de données
Les patients inclus pourront à tout moment, s’ils le désirent, s’opposer à l’utilisation de leurs données, sans avoir à justifier leur décision.

* Retombées attendues
Les retombées attendues de la recherche concernent l’amélioration des connaissances sur la gestion de la ventilation mécanique lors de la phase de transition d’un SDRA.

* Balance bénéfice risque
Pour les patients participants, il s’agit d’une étude observationnelle visant à évaluer un soin courant. Leur prise en charge ne sera pas modifiée par le protocole de recherche.
Pour la société, l’évaluation de la faisabilité d’une stratégie de réglage de l’aide inspiratoire sur un objectif de P0.1 permettra d’ouvrir la voie à un essai clinique sur les stratégies de réglage de la ventilation assistée lors de la phase de transition, avec éventuellement un ensemble de mesures ou « bundle » plus large tenant compte à la fois du niveau d’assistance mais également de la gestion de l’acidose métabolique, de l’antalgie et de l’anxiolyse.

Données utilisées

Catégories de données utilisées

Informations recueillies à l'occasion d'activités de prévention, de diagnostic, de soins ou de suivi social et médico-social

Source de données utilisées

Autre

Autre(s) source(s) de donnée(s) mobilisée(s)

Dossiers Médicaux

Appariement entre les sources de données mobilisées

  Non

Variables sensibles utilisées

Année et mois de naissance
Date de soins (JJ/MM/AAAA)
Date de décès (JJ/MM/AAAA)

Justification du recours à cette(ces) variable(s) sensible(s)

Les dates précises sont nécessaires pour les besoins scientifiques et méthodologiques de l’étude :

- Année et mois de naissance : permet de calculer avec précision l’âge au moment de la prise en charge, variable indispensable pour la description de la population et les analyses statistiques.
- Dates de soins : nécessaires pour reconstituer la chronologie des événements cliniques (admission, intubation, transition vers la ventilation assistée, sevrage ventilatoire, extubation) et analyser les délais entre les différentes étapes de la prise en charge.
- Date de décès : indispensable pour calculer les durées de survie et les issues de prise en charge.

Ces variables temporelles sont utilisées uniquement à des fins d’analyse scientifique, sur des données pseudonymisées, dans le respect du cadre réglementaire MR-004, et leur utilisation est limitée au strict nécessaire.

Recours au numéro d'identification des professionnels de santé

  Non

Plateforme utilisée pour l'analyse des données

Autre

Acteurs finançant et participant à l'étude

Responsable(s) de traitement

Type de responsable de traitement 1

Etablissement public de santé (dont fédération)

Responsable de traitement 1

GHU AP-HP. Hôpitaux Universitaires Henri Mondor

1 Rue Gustave Eiffel 94000 Créteil 94010 CRETEIL France

Localisation du responsable de traitement 1
  Dans l'UE
Représentant du responsable de traitement 1
Anne-Fleur HAUDEBOURG

Calendrier du projet

Date de début : 16/09/2025 – Date de fin : 16/09/2030 Durée de l'étude : 60
Etape 1 : Dépôt du projet
07/11/2025

Base légale pour accéder aux données

Encadrement réglementaire

Méthodologie de référence 004

Durée de conservation aux fins du projet (en années)

15

Existence d'une prise de décision automatisée

  Non

Fondement juridique

Article 6 du RGPD (Licéité du traitement)

(1)(e) exécution d’une mission d’intérêt public

Article 9 du RGPD (Exception permettant de traiter des données de santé)

(2)(j) archives, recherche scientifique ou historique, ou statistiques

Transfert de données personnelles vers un pays hors UE

  Non

Droits des personnes

Conformément au Règlement (UE) 2016/679 (articles 15 à 20), les personnes concernées disposent d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de limitation du traitement et d’opposition.

Dans le cadre de cette étude, réalisée sous le régime de la méthodologie de référence MR-004, ces droits s’exercent auprès du responsable de traitement ou, le cas échéant, par l’intermédiaire de l’établissement de santé dans lequel les données ont été collectées.

Les demandes sont traitées conformément aux dispositions de la MR-004, sous réserve que l’exercice de ces droits ne compromette pas la réalisation des objectifs scientifiques de la recherche.

Les personnes sont informées de leurs droits via la délivrance d'une lettre d’information patient remise dans le cadre de l’étude et/ou via un livret d'accueil (https://reamondor.aphp.fr/recherches-sur-donnees-hors-loi-jarde/)

Délégué à la protection des données

Assistance Publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP)

55 Boulevard Diderot 75012 Paris 75012 PARIS France

dpo@aphp.fr