Maltraitance à l’enfance
Contexte
La notion de maltraitance infantile recouvre les violences (physiques, psychiques ou sexuelles) et/ou la négligence infligée par un membre de la famille ou de l’entourage de l'enfant (de moins de 18 enfants). Chaque année, en France, les forces de l’ordre enregistrent plus de 120 cas d’infanticide, dont près d’une centaine ont lieu dans le cadre intrafamilial. L’infanticide est le paroxysme des violences infligées à un enfant. Pour mieux les prévenir, il est nécessaire de repérer les enfants maltraités au plus tôt. Mais, dans la plupart des cas, seuls les épisodes les plus graves de violences sont repérés et/ou portés à la connaissance des forces de l'ordre, ce qui ne permet qu'une quantification partielle du phénomène. Une étude publiée dans le Lancet en 2009 a montré qu'en moyenne 10 % des enfants vivant dans un pays à haut niveau de revenus sont maltraités ou négligés. Les violences psychiques, sexuelles ou négligences ne sont que plus rarement identifiés.
Pour pallier ce manque, le dispositif OLINPE, mené par l’Observatoire national de protection de l’enfance (ONPE), s’est intéressé à cette problématique en partant du constat initial que la France manquait de données chiffrées sur les enfants et les familles pris en charge en protection de l’enfance. Fin 2021, l’ONPE estime qu’en France 310 525 mineurs ont fait l’objet d’une mesure de protection, c’est-à-dire que la justice a été saisie et un juge a décidé de la mise en place d’une action de protection envers l’enfant. Ainsi, les chiffres de l’ONPE répertorient uniquement les mineurs qui bénéficient d’une prestation ou d’une mesure relevant du dispositif de protection de l’enfance. De ce fait, les mineurs qui sont maltraités mais dont la situation n’a pas été remontée aux forces de l’ordre n’apparaissent dans aucune base de données. De ce fait, même si le dispositif OLINPE a permis des avancées, les données concernant la maltraitance infantile restent encore insuffisantes en France. Il est donc primordial aujourd’hui de répondre à la double problématique : chiffrer, de manière fiable, les cas où les enfants ont été diagnostiqués comme maltraités ; et estimer le nombre d’enfants maltraités qui ne sont pas diagnostiqués.
Objectif du projet
C’est pour répondre à cette problématique que le CHU de Dijon a développé un algorithme, basé sur les données du PMSI (Programme de Médicalisation des Systèmes d’Information), afin d’identifier les hospitalisations pour maltraitance physique chez les enfants de moins de 2 ans. Le choix de ce sous-type particulier de violence et de cette population restreinte a été dicté par l’importance des conséquences de ce type de maltraitance pour cette tranche d’âge. La maltraitance physique génère en effet des blessures qu’un intervenant extérieur est en mesure d’identifier ; il s’agit donc d’un critère diagnostique qui est parfaitement objectif. En raison du différentiel dans le rapport de force physique entre l’adulte et l’enfant, ces violences sont, chez le jeune enfant, fréquemment à l’origine de lésions traumatiques graves, voire mortelles, nécessitant des soins hospitaliers. Les données hospitalières sont donc une source majeure d’information sur le phénomène de maltraitance physique envers les enfants.
L’objectif du projet MALTRAITANCE À L'ENFANCE est ainsi de tester la pertinence de cet algorithme et de le valider. Il pourrait être un outil prometteur pour identifier les séjours hospitaliers pour maltraitance chez les jeunes enfants et ainsi mieux comptabiliser les cas de maltraitance infantile ayant entraîné une hospitalisation. L’objectif de cet algorithme est de pouvoir construire un indicateur utilisable pour alimenter un baromètre de la maltraitance à l’enfant en France et au niveau européen afin d’améliorer les connaissances et d’adapter les politiques publiques.
Méthodologie et caractère innovant
Cet algorithme, développé par le CHU de Dijon, est le premier créé pour repérer les cas de maltraitance physique à partir de données médico-administratives. A partir d’une importante revue de littérature et de l’étude des codes utilisés dans le PMSI, le porteur de projet, le Pr Quantin du service Biostatistiques et Information Médicale, en collaboration avec le Pr François Purssell du service de Médecine Légale et les Drs Gilard-Pioc et Loiseau du CHU Dijon, ont identifié les codes permettant de repérer les agressions et les lésions suspectes. L’étude de validation par retour aux dossiers médicaux dans huit hôpitaux (sept centres hospitaliers universitaires et un centre hospitalier) répartis sur toute la France doit permettre de vérifier la fiabilité de cet algorithme.
Le projet MALTRAITANCE À L'ENFANCE a été lauréat de la seconde vague de l’appel à manifestation d’intérêt Bibliothèque ouverte d’algorithmes en santé (AMI BOAS), lancée en 2022. Dans ce cadre, l’apport du Health Data Hub a consisté à fournir un accompagnement financier.
Résultat / Livrable
L’objectif du projet est de valider cet algorithme. Il pourra être mis à disposition de la communauté scientifique et permettra de construire un indicateur utilisable pour alimenter un baromètre de la maltraitance à l’enfant en France et au niveau européen.